Une visioconférence a réuni quelques Lieux d’Eglise le 18 Mai 2024.
Après ce « tour de table », riche des belles choses qui se vivent en nos Lieux, nous constatons que nous sommes confrontés aux mêmes questions..
Deux questions en particulier
Nos Lieux ont 30 ans ou plus. Correspondent-ils à une demande d’aujourd’hui ?
(Cf Bruno Latour « Nous avons changé de monde... »). La visée de nos Lieux, lors de leur création, est toujours valable, mais à décliner autrement, à adapter au monde actuel.
Des pistes existent : celle de l’écologie, par exemple, peut toucher beaucoup de monde. Un Inter Lieux sur l’écologie intégrale aurait certainement du succès.
En attendant, une proposition.
En août 2025, le C.M.R. organise un « Festi’Rural », du 22 au 24 août, au Lioran, dans le Cantal, endroit choisi car l’évêque est demandeur.
Il y aura là un village des initiatives.
Les Lieux d’Eglise y auraient leur place et pourraient se servir de ce regroupement pour réfléchir ensemble aux questions qui se posent à nous.
Nos Lieux apporteraient leur originalité, leur expérience, leurs spécificités pour en faire profiter le Village des initiatives et en retour profiteraient de l’organisation portée par le C.M.R. Une sorte de mini-interlieux.
De plus le thème de ce « Festi’Rural » porte sur l’écologie intégrale.
L’idée est cohérente, car le C.M.R. et les Lieux d’Eglise sont un peu de la même famille.
L’idée est lancée.
Les dernières publications des Lieux d'Eglise de France
La Feuille de Chou du Puits d'Hiver
Voici enfin la FEUILLE de CHOU n° 86 de juin 2023.
Vous y trouverez tout ce qui fait la vie de notre lieu d’Église :
- des comptes rendus de rencontres et de formations;
- des rendez-vous de pause spirituelle ;
- une attention au monde agricole qui nous entoure ;
- la préoccupation de mûrir nos réflexions sur le vaste sujet de la fin de vie ;
- et plus que jamais la nécessité de mieux respecter la Création pour assurer la survie de l'Humanité...
Allez vite à la dernière page pour trouver l' AGENDA et les prochains rendez-vous.
Et n'hésitez pas à ouvrir notre site en tapant Puits d'Hiver sur votre moteur de recherche.
BON ÉTÉ à VOUS TOUTES ET TOUS !
Pour le Puits d'Hiver, Christian
Alire ici :
1 – L'inter Lieux Ascension 2022
2 - Sommaire
3 - Cartes des Lieux en France
4 - Les Amis présents
5 - Présentation
6 - Accueil par les Présidents
7 à 11 - Les animations présentées le 14/05/21 (rencontre en visio)
La Parole dans l'Église
12 et 13 - M. Arnaud Rejoindre Lambert
14 et 15 - Père Joël Morlet
La Parole dans la société
16 - Hélène Corbie (Journaliste) et Solidarité Paysans 27 (Thierry Mangeart et Odile Dorchies)
17 et 18 - Le Fraternibus
19 - Les ateliers du vendredi après-midi
20 et 21 - Récapitulatif des témoignages
22 - Lettre à mon Église
23 - Lettre à mon Église par Transhumances
La Parole dans la Bible
24 - Père Nicolas Le Bas
25 à 28 Célébration du samedi matin
29 - Conclusion
30 à 33 - Le Monastère Sainte Françoise Romaine
34 - Annexes
https://ahp.li/52d66121aeebd6640bb0.pdf
Cet interlieux a rassemblé une dizaine de lieux d'Eglise en Rural des 4 monnaies de France au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine au Bec Hellouin ; il a permis d'échanger les points de vue, de partager la Parole, de dire et de se dire dans la joie.
Le jeudi de l'Ascension, Transhumances, l'Horizon, l'Oustal, Puits d'hiver, Partage et Pont de Pierre, Re-Source,Notre Eglise demain... entre nos mains, Le Carrefour Rural et Le Vivier se sont retrouvé au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine, pour se partager le vécu entre lieux d'Eglise.
Lire la suite ici :
https://ahp.li/8d8622f07582d2bc8058.pdf
https://ahp.li/76a56f3fcb35f355db65.pdf
Dans la suite des réflexions sur le Synode 2023, des participants à l'interlieux ont voulu écrire une Lettre à notre Église.
Voici celle de Transhumances.
https://ahp.li/27ef77701bd04272576f.pdf
1 Et mêm' sans église attirée/
Exilés hors des bénitiers/
Cherchons l'air hors de la ville
Un' respiration d'évangile/
2 Et même si longtemps confinés/
Échanger, aider et prier/
Changeur de terre ou de trace/
Trouver dans l'exil nos espaces/
S'abstenir :
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves/
Allons au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves/
3 Même si l'incertitude/
Inquiète nos lendemains/
Compagnons une certitude/
Sans défiance pour demain/
4 Se laisser altérer jamais/
Écologie, solidarité/
Ouverture et fraternité/
C'est notre cri pour la paix
S'abstenir
*********
**********
La circulation de la parole dans les nouveaux lieux d'Eglise en rural
Intervention de Jean-François Petit à la Visio conférence du 14 mai 2021
Cette courte intervention voudrait tenter de ressaisir ce qui se joue dans la circulation de la parole, telle qu'elle est pratiquée dans les nouveaux lieux d'Église en rural (NLER). Les quatre séries de témoignages nous ont permis d'en avoir une appréhension large, sans la réduire à un seul registre : les NLER se révélant bien aux carrefours d'attentes et de pratiques, que j'aimerais approfondir avec vous dans une perspective librement inspirée du jésuite Michel de Certeau pour voir l'aventure spirituelle qui s'y joue*.
Malgré leur fragilité, et peut être justement en raison de leur « porosité » avec les attentes et aspirations du monde rural, les NLER sont des lieux particulièrement propices à une circulation libre de la parole, au moment où les institutions ecclésiales sont affaiblies et décrédibilisées, tentées par un regain d'autoritarisme, à une période où le confinement en ajoute à la sécularisation ambiante**. Cette intervention comportera donc deux parties : des remarques sur la parole et des remarques sur la « croire » dans les lieux d'Église en rural.
I/ REMARQUES SUR LA PAROLE
Les différents témoignages entendus montrent la richesse de la diversité vécue dans les NLER mais on peut y regarder de plus près.
Première remarque : qui parle ? des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des enfants, des « invisibles », des marginalisés, des « intégrés », des proches et des lointains, des homo et des hétéro, des célibataires et des gens mariés, des laïcs et des prêtres, des religieux/religieuses, des diacres, des croyants de toutes confessions, des incroyants, des « personnalités qualifiées » et des « sans grade »… La parole ne prend pas la forme d'un seul mode d'émission et ne descend pas d'en haut, de façon surplombante, pour « coiffer » ou « redresser » des situations.
Les NLER, dans la diversité des locuteurs, font droit au besoin général d'expressivité, dans une écoute bienveillante, sans a priori, pour que les questions les recherches, les hésitations, les doutes, puissent être librement autorisés, dans une attention aux voies émergentes (aux "petits prophètes" d'aujourd'hui). C'est aussi l'inattendu, l'inouï de la « foi » et de la « vie » de frères et de sœurs qui s'y jouent.
Deuxième remarque : de quoi parle-t-on ? A priori de tout : il n'y a pas de sujets convenus, attendus, contrôlés. La libre circulation de la parole empêche ce qui est dit qu'il est sélectionné à priori, éliminé, remodelé, hiérarchisé et interprété, en fonction des critères d'orthodoxie à la tradition religieuse, à la « bien-pensance ». On peut y parler de l'actualité mais aussi de tout ce qui fait la vie, de la convivialité mais aussi de sujets plus « sérieux », liés à la proximité ou à des enjeux globaux, aux questions émergentes comme aux réalités déjà présentes, Cela n'empêche les participants d'opérer un discernement de ce qui est dit ou écrit, mais la production du sens n'est pas monopolisée par une personne ou un groupe qui donnerait des « brevets de conformité ».C'est le droit à la libre recherche, à l'expérimentation, au tâtonnement,
Ou dans un monde en transformation globale, où les mutations sont nombreuses, nous n'avons jamais tant eu besoin d'explorer de nouvelles voies, tant sur les circuits économiques courts que sur les formes de scolarisation ou sur les recherches spirituelles contemporaines.
Troisième remarque : comment parle-t-on ? Si le modèle simple d'une communauté ayant une seule autorité n'existe plus en rural, structuré autour de la famille, du village ou de la foi, on parle nécessairement de façon polyphonique. Il n'y a plus qu'une seule « référence » mais plusieurs cercles d'appartenance, comportant chacun plusieurs réseaux. Les espaces apparemment désertifiés sont aussi largement interconnectés. On parle donc dans un souci d'accueil inconditionnel, de proximité, de respect, d'absence de jugement de bienveillance mais aussi dans un débordement constant des pratiques, des croyances, de ce qui conduit à un débordement constant des stéréotypes ou des autorités, du type « l'Eglise a dit que », « ma famille pense que »… Les désaccords y sont régulés.Une parole risquée est toujours fragile pour celui qui l'énonce et celui qui la reçoit.
Globalement, on peut dire que les NLER "prendre soin" de la parole. On y croit qu'un climat de confiance fait émerger la parole personnelle vraie et qu'une parole collective (et parfois publique) peut y être élaborée.
Quatrième remarque : pourquoi parle-t-on ? Dans ces paroles reçues et échangées, se trouve la conviction que nous partageons tous la même humanité, que nous sommes « dans le même bateau ». Se trouve présenté là une exigence d'humanité et de croyant : à travers la parole humaine se trouve peut-être la Parole d'un autre qu'on peut apprendre à écouter ensemble. C'est cette confiance à la possibilité de découvrir les traces d'un visage différent qui anime les participants des activités des NLER.Les gens y expérimentent leur « foi », au sens large du terme, ils se chargent à un discours en « je », de façon libre et adulte, mais aussi en « nous » (ils deviennent, membres d'une même quête, dans une communauté de fait, dans une solidarité des ébranlés, dans un projet, dans une forme de partage et de prière). Cette parole se veut une parole « citoyenne », portée collectivement (par des groupes, des associations…). Elle répare (les situations plus injustes, les manques, les failles) et prépare (des temps, des horizons nouveaux).
Ayant abandonné toute protection d'une autorité leur délivrant des normes de comportement traditionnel, des habitudes, des routines et des sépulcres blancs, ils se sont posés les questions essentielles concernant les raisons de vivre, de croire, d'espérer. Leur sagesse est simplifiée et approfondie
Cinquième remarque : à qui parle-t-on ? Sans doute, à tous ceux qui ont envie de bouger, de grandir, d'avancer dans la vie, en particulier aux plus fragiles, aux « périphériques existentielles » mais plus que des « cibles » de communication, il faudrait plutôt aujourd'hui approfondir les modalités de mise en réseau, de lien (entre ville et campagne par exemple)… pour ne pas parler dans le désert. Une véritable parole est toujours une parole destinée, à soi, aux autres et à Dieu.
II/REMARQUES SUR LE CROIRE EN RURAL
On peut dire que si le rural aujourd'hui apparaît à certains observateurs de plus en plus d'asservi à des fins matérielles, y compris une reconquête comme espace d'innovation et de participation et la recherche d'une cohérence et cohésion territoriale, il est aussi un lieu d'expérimentation d'un « croire ».
Ou ce croire est essentiel à la vie en rural : il précède l'autorité et engendre l'institution. Le croire en une autorité est certes un critère de l'institution. Mais le croire dépasse souvent les limites des structures dans lesquelles nous voudrions le réduire. Il excède même nos paroles. Il peut faciliter la cohésion comme engendrer un cloisonnement communautaire.
Bien accompagné, le croire mobilisé dans le langage – que-ci soit témoignage, oral ou écrit, présentiel ou distanciel, récit (à scruter comme dans les Ecritures ou à écrire comme dans un mouvement ou un lieu) – joue un rôle essentiel de médiation des représentés dans les énonciations : il donne de l'autorité aux énonciations plus qu'aux énonciateurs et parfois aussi à la consistance à la doctrine qui est le garant des contenus du croire, en particulier au plan catholique.
Sans doute les autorités (notamment ecclésiales) sont fragmentées et deviennent multiples. Le christianisme est en voie d'exculturation depuis longtemps. Dans ce contexte, les énonciations deviennent plus complexes à opérer : l'affaiblissement des autorités dans leur forme traditionnelle sont en train de conduire à leur perte de créé et à un manque de confiance en elles, entraînant la place à des autorités se présentant comme " charismatiques ». » (au sens sociologique du terme) ou des formes plus légalistes, perçues comme plus rassurantes.
Ou le croire n'assister pas à une institution (comme l'Église) pour se faire rejeter même si celle-ci peut l'autoriser. Le croire peut chercher une institution pour le conforter (un diocèse ou une congrégation). En retour, l'institution peut lui donner forme, dans le cas présent, en soutenant les lieux d'Église.
Le croire se retrouve ainsi à la base d'une action, d'une pratique et d'une adhésion. Il permet d'agir au lieu de subir. Il permet de critiquer mais aussi de proposer, de dénoncer mais aussi d'annoncer. Il existe de ce fait une circularité entre le croire et l'action : le croire s'exprime en acte et en parole. Une communauté nait du besoin de croire, exacerbé par le vide de la société. Il se conjugue en une appartenance. Reste à espérer que ce croire puisse continuer à éviter la territorialisation forcée, l'assujettissement, y compris en des formes archaïques alors que le besoin de croire n'a jamais été aussi grand.
Un rassemblement des lieux d'Église en rural comme celui que nous venons de vivre peut-il permettre plus que le recueil de cette diversité du croire, essentiel pour l'avenir de l'espace rural ? Affaire à suivre…
Jean-François Petit, Institut Catholique de Paris
jfpetit@netcourrier.com
* Cf J.-F PETIT, Michel Foucault et Michel de Certeau, le dialogue inachevé, Parole et Silence, 2020
** Cf. J.-F. PETIT, Ils ont été pris d'une grande frayeur, Éd. St Léger, 2020
Le Carrefour Rural et Le Vivier, co-organisateurs de l’Interlieux Ascension 2021 au Bec Hellouin, ont décidé de reporter l’évènement qui devait avoir lieu les jeudi 13, vendredi 14 et samedi 15 mai au Monastère des sœurs Sainte Françoise Romaine du Bec Hellouin. Compte tenu des mesures sanitaires relatives au corona virus prises pour avril et début mai 2021 par le gouvernement, nous ne pourrons pas utiliser la salle municipale qui devait accueillir les intervenants. Le monastère qui devait nous héberger ne le pourra pas non plus.
L’équipe organisatrice a réfléchi à deux solutions de rencontre.
Dans le même esprit de ce qui a été vécu en février et en mars 2021, un premier rendez-vous a eu lieu :
Nous conservons le même thème : « LA PAROLE » ; il sera repris et retravaillé, en vous proposant notamment des visio-débats de contact entre les lieux d’Eglise en Rural d’ici l’Ascension 2022.
Ce temps de Pâques nous appelle à revivre nos rencontres d’une autre manière en gardant au cœur cependant notre joie.
Fraternellement,
Le Carrefour Rural et Le Vivier
Ci-dessous, deux diaporama présentant l'importance de la Parole partagée pour Transhumances.
* Cf J.-F PETIT, Michel Foucault et Michel de Certeau, le dialogue inachevé, Parole et Silence, 2020
** Cf J.-F. PETIT, Ils furent pris d’une grande frayeur, Ed. St Leger, 2020
https://ahp.li/6d3bf8f67fd704646fdc.pdf
La Lettre du Lieux d'Eglise "L'Horizon"
dans les Vosges
Lire ici :
https://ahp.li/55ae76c796699e77964c.pdf
Sommaire :
1 – L’inter Lieux Ascension 2022
2 - Sommaire
3 - Cartes des Lieux en France
4 - Les Amis présents
5 - Présentation
6 - Accueil par les Présidents
7 à 11 - Les animations présentées le 14/05/21 (rencontre en visio)
La Parole dans l’Église
12 et 13 - Mr Arnaud Join Lambert
14 et 15 - Père Joël Morlet
La Parole dans la société
16 - Hélène Corbie (Journaliste) et Solidarité Paysans 27 (Thierry Mangeart et Odile Dorchies)
17 et 18 - Le Fraternibus
19 - Les ateliers du vendredi après-midi
20 et 21 - Récapitulatif des témoignages
22 - Lettre à mon Église
23 - Lettre à mon Église par Transhumances
La Parole dans la Bible
24 - Père Nicolas Le Bas
25 à 28 Célébration du samedi matin
29 - Conclusion
30 à 33 - Le Monastère Sainte Françoise Romaine
34 - Annexes
https://ahp.li/52d66121aeebd6640bb0.pdf
Dans la suite des réflexions sur le Synode 2023, des participants à l'interlieux ont voulu écrire une Lettre à notre Eglise.
Voici celle de Transhumances.
Cet interlieux a rassemblé une dizaine de lieux d'Eglise en Rural des 4 coins de France au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine au Bec Hellouin; il a permis d'échanger les points de vue, de partager la Parole, de dire et de se dire dans la joie.
Le jeudi de l'Ascension, Transhumances, l'Horizon, l'Oustal, Puits d'hiver, Partage et Pont de Pierre, Re-Source,Notre Eglise demain... entre nos mains, Le Carrefour Rural et Le Vivier se sont retrouvés au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine, pour se partager le vécu entre lieux d'Eglise.
Lire la suite ici :
A partir du jeudi de l'ascension, nous serons 4 membres de Transhumances à participer à l'Interlieux 2022.
Un temps fort où nous partagerons aux autres Lieux d'Eglise, le vécu de Transhumances.
Martine B, Mireille, Martine C et Jean-Marie
https://levivier.cathocambrai.com/interlieux-2021.html
https://chretiens-ruraux.fr/2021/06/23/interlieux-rencontre-2021-des-lieux-deglise-en-rural/
Petite chanson pastiche préparée pour l'interlieux 2022.
1 Et mêm’ sans église attitrée/
Exilés hors des bénitiers/
Cherchons l’air hors de la ville/
Un’ respiration d’évangile/
2 Et même si longtemps confinés/
Echanger, aider et prier/
Changer de terre ou de trace/
Trouver dans l’exil nos espaces/
Refrain :
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves/
Allons au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves/
3 Même si l’incertitude/
Inquiète nos lendemains/
Compagnons une certitude/
Sans défiance pour demain/
4 Se laisser altérer jamais/
Ecologie, solidarité/
Ouverture et fraternité/
C’est notre cri pour la paix/
Refrain
Intervention de Jean-François Petit à la Visio conférence du 14 mai 2021
Cette courte intervention voudrait tenter de ressaisir ce qui se joue dans la circulation de la parole, telle qu’elle est pratiquée dans les nouveaux lieux d’Eglise en rural (NLER). Les quatre séries de témoignages nous ont permis d’en avoir une appréhension large, sans la réduire à un seul registre : les NLER se situent bien aux carrefours d’attentes et de pratiques, que j’aimerais approfondir avec vous dans une perspective librement inspirée du jésuite Michel de Certeau pour voir l’aventure spirituelle qui s’y joue*.
Malgré leur fragilité, et peut être justement en raison de leur « porosité » avec les attentes et aspirations du monde rural, les NLER sont des lieux particulièrement propices à une circulation libre de la parole, au moment où les institutions ecclésiales sont affaiblies et décrédibilisées, tentées par un regain d’autoritarisme, à une période où le confinement en ajoute à la sécularisation ambiante**. Cette intervention comportera donc deux parties : des remarques sur la parole et des remarques sur le «croire » dans les lieux d’Eglise en rural.
I/ REMARQUES SUR LA PAROLE
Les différents témoignages entendus montrent la richesse de la diversité vécue dans les NLER mais on peut y regarder de de plus près.
Première remarque : qui parle ? des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des enfants, des « invisibles », des marginalisés, des « intégrés », des proches et des lointains, des homo et des hétéro, des célibataires et des gens mariés, des laïcs et des prêtres, des religieux/religieuses, des diacres, des croyants de toutes confessions, des incroyants, des « personnalités qualifiées » et des « sans grade »… La parole ne prend pas la forme d’un seul mode d’émission et ne descend pas d’en haut, de façon surplombante, pour « coiffer » ou « rectifier » des situations.
Les NLER, dans la diversité des locuteurs, font droit au besoin général d’expressivité, dans une écoute bienveillante, sans a priori, pour que les questions les recherches, les hésitations, les doutes, puissent librement être formulés, dans une attention aux voies émergentes (aux « petits prophètes » d’aujourd’hui). C’est aussi l’inattendu, l’inouï de la « foi » et de la « vie » de frères et de sœurs qui s’y joue.
Deuxième remarque : de quoi parle-t-on ? A priori de tout : il n’y a pas de sujets convenus, attendus, contrôlés. La libre circulation de la parole empêche ce qui est dit qu’être sélectionné à priori, éliminé, remodelé, hiérarchisé et interprété, en fonction de critères d’orthodoxie à la tradition religieuse, à la « bien-pensance ». On peut y parler de l’actualité mais aussi de tout ce qui fait la vie, de la convivialité mais aussi de sujets plus « sérieux », liés à la proximité ou à des enjeux globaux, aux questions émergentes comme aux réalités déjà présentes, Cela n’empêche les participants d’opérer un discernement de ce qui est dit ou écrit, mais la production du sens n’est pas monopolisée par une personne ou un groupe qui donnerait des « brevets de conformité ». C’est le droit à la libre recherche, à l’expérimentation, au tâtonnement, aussi bien sur les hypothèses de lecture de l’Evangile que sur les évolutions agricoles qui est ici légitimement revendiqué.
Or dans un monde en transformation globale, où les mutations sont nombreuses, nous n’avons jamais tant eu besoin d’explorer de nouvelles voies, tant sur les circuits économiques courts que sur les formes de scolarisation ou sur les recherches spirituelles contemporaines.
Troisième remarque : comment parle-t-on ? Si le modèle simple d’une communauté ayant une seule autorité n’existe plus en rural, structuré autour de la famille, du village ou de la foi, on parle nécessairement de façon polyphonique. Il n’y a plus une seule « référence » mais plusieurs cercles d’appartenance, comportant chacun plusieurs réseaux. Les espaces apparemment désertifiés sont aussi plus largement interconnectés. On parle donc dans un souci d’accueil inconditionnel, de proximité, de respect, d’absence de jugement de bienveillance mais aussi dans un constant débordement des pratiques, des croyances, de ce qui conduit à un constant débordement des stéréotypes ou des autorités, du type « l’Eglise a dit que », « ma famille pense que »… Les désaccords y sont régulés. Une parole risquée est toujours fragile pour celui qui l’énonce et celui qui la reçoit.
Globalement, on peut dire que les NLER « prennent soin » de la parole. On y croit qu’un climat de confiance fait émerger la parole personnelle vraie et qu’une parole collective (et parfois publique) peut y être élaborée.
Quatrième remarque : pourquoi parle-t-on ? Dans ces paroles reçues et échangées, se trouve la conviction que nous partageons tous la même humanité, que nous sommes « dans le même bateau ». Se trouve exprimée là une exigence d’humanité et de croyant : à travers la parole humaine se trouve peut-être la Parole d’un Autre qu’on peut apprendre à écouter ensemble. C’est cette confiance à la possibilité de découvrir les traces d’un visage différent qui anime les participants des activités des NLER. Les gens y expriment leur « foi », au sens large du terme, ils se risquent à un discours en « je », de façon libre et adulte, mais aussi en « nous » (ils deviennent partenaires, membres d’une même quête, dans une communauté de fait, dans une solidarité des ébranlés, dans un projet, dans une forme de partage et de prière). Cette parole se veut une parole « citoyenne », portée collectivement (par des groupes, des associations…). Elle répare (les situations plus injustes, les manques, les failles) et prépare (des temps, des horizons nouveaux).
Ayant abandonné toute protection d’une autorité leur délivrant des normes de comportement traditionnel, des habitudes, des routines et des sépulcres blanchis, ils se reposent les questions essentielles concernant les raisons de vivre, de croire, d’espérer. Leur sagesse est à recueillir et à approfondir
Cinquième remarque : à qui parle-t-on ? Sans doute, à tous ceux qui ont envie de bouger, de grandir, d’avancer dans la vie, en particulier aux plus fragiles, aux « périphéries existentielles » mais plus que des « cibles » de communication, il faudrait plutôt aujourd’hui approfondir les modalités de mise en réseau, de lien (entre ville et campagne par exemple)… pour ne pas parler dans le désert. Une véritable parole est toujours une parole adressée, à soi, aux autres et à Dieu.
II/ REMARQUES SUR LE CROIRE EN RURAL
On peut dire que si le rural aujourd’hui apparait à certains observateurs de plus en plus asservi à des fins matérielles, y compris une reconquête comme espace d’innovation et de participation et la recherche d’une cohérence et cohésion territoriale, il est aussi un lieu d’expérimentation d’un « croire ».
Or ce croire est essentiel à la vie en rural : il précède l’autorité et engendre l’institution. Le croire en une autorité est certes un critère de l’institution. Mais le croire dépasse souvent les limites des structures dans lesquelles nous voudrions le restreindre. Il excède même nos paroles. Il peut faciliter la cohésion comme engendrer un cloisonnement communautariste.
Bien accompagné, le croire mobilisé dans le langage – que celui-ci soit témoignage, oral ou écrit, présentiel ou distanciel, récit (à scruter comme dans les Ecritures ou à écrire comme dans un mouvement ou un lieu) – joue un rôle essentiel de médiation des énoncés dans les énonciations: il donne de l’autorité aux énonciations plus qu’aux énonciateurs et parfois aussi à la consistance à la doctrine qui est le garant des contenus du croire, en particulier au plan catholique.
Sans doute les autorités (notamment ecclésiales) sont fragmentées et deviennent multiples. Le christianisme est en voie d’exculturation depuis longtemps. Dans ce contexte, les énonciations deviennent plus complexes à opérer : l’affaiblissement des autorités dans leur forme traditionnelle sont en train de conduire à leur perte de crédibilité et à un manque de confiance en elles, laissant place à des autorités se présentant comme « charismatiques » (au sens sociologique du terme) ou des formes plus légalistes, perçues comme plus rassurantes.
Or le croire n’attend pas une institution (comme l’Eglise) pour se déployer même si celle-ci peut l’autoriser. Le croire peut chercher une institution pour le conforter (un diocèse ou une congrégation). En retour, l’institution peut lui donner forme, dans le cas présent, en soutenant les lieux d’Eglise.
Le croire se retrouve ainsi à la base d’une action, d’une pratique et d’une adhésion. Il permet d’agir au lieu de subir. Il permet de critiquer mais aussi de proposer, de dénoncer mais aussi d’annoncer. Il existe de ce fait une circularité entre le croire et l’action : le croire s’exprime en acte et en parole. Une communauté nait du besoin de croire, exacerbé par le vide de la société. Il se conjugue en une appartenance. Reste à espérer que ce croire puisse continuer à éviter la territorialisation forcée, l’assujettissement, y compris en des formes archaïques alors que le besoin de croire n’a jamais été aussi grand.
Un rassemblement des lieux d’Eglise en rural comme celui que nous venons de vivre peut-il permettre plus que le recueil de cette diversité du croire, essentiel pour l’avenir de l’espace rural ? Affaire à suivre…
Jean-François Petit, Institut Catholique de Paris
jfpetit@netcourrier.com
Il existe une quinzaine de "Lieux d'Eglise" comme Transhumances répartis en France. Tous les 2 ou 3 ans, ils se rassemblent, le temps d'un grand week-end, pour échanger et célébrer sur un thème.
Cette année ce rassemblement aura lieu du 13 au 15 mai (Ascension) en Normandie au Bec Hellouin sur le thème de :
La Parole.
"parole des hommes ? Parole de Dieu ? A qui donnons-nous la parole dans nos Lieux ? où ? Comment ? Qui écoutons-nous, ? Quand la partageons-nous ?"
Avec :
P. Joël Morlet : délégué national, mission en monde rural
P. Jean-François Petit : Religieux assomptionniste, docteur en philosophie, maître assistant à la faculté de l’Institut catholique de Paris
Hélène Corbie : Journaliste Reporter d'Images, créatrice de Podcast.
P. Yves Spriet : prêtre signataire de la lettre des 7 prêtres « pour rebâtir l’Eglise »
Si vous êtes partants, veuillez contacter, samedi 9 janvier au plus tard, Martine (0688203333) ou Pascale (0662672909) ou venir en parler ce samedi 09/01 à partir de 16h30 avant la lecture de « Fratelli Tutti » sur zoom.
Commentaires
08.10 | 11:43
Verhelst « quand je suis faible je suis fort « Debout dans l’épreuve
08.10 | 11:41
Lire le témoignage très frappant et émouvant de Thierry Verhelst attei...
01.10 | 05:38
Le pire ,comme l'a dit Anne Sinclair à propos d'elle-même et de DSK ,c'es...
22.08 | 05:09
Merci pour ces messages de l'été. Ils me rejoignent en Corrèze où je suis ve...
Il existe une quinzaine de "Lieux d'Eglise" comme Transhumances répartis en France. Tous les 2 ou 3 ans, ils se rassemblent, le temps d'un grand week-end, pour échanger et célébrer sur un thème.
Cette année ce rassemblement aura lieu du 13 au 15 mai (Ascension) en Normandie au Bec Hellouin sur le thème de :
La Parole.
"parole des hommes ? Parole de Dieu ? A qui donnons-nous la parole dans nos Lieux ? où ? Comment ? Qui écoutons-nous, ? Quand la partageons-nous ?"
Avec :
P. Joël Morlet : délégué national, mission en monde rural
P. Jean-François Petit : Religieux assomptionniste, docteur en philosophie, maître assistant à la faculté de l’Institut catholique de Paris
Hélène Corbie : Journaliste Reporter d'Images, créatrice de Podcast.
P. Yves Spriet : prêtre signataire de la lettre des 7 prêtres « pour rebâtir l’Eglise »
Si vous êtes partants, veuillez contacter, samedi 9 janvier au plus tard, Martine (0688203333) ou Pascale (0662672909) ou venir en parler ce samedi 09/01 à partir de 16h30 avant la lecture de « Fratelli Tutti » sur zoom.
Le Carrefour Rural et Le Vivier, co-organisateurs de l’Interlieux Ascension 2021 au Bec Hellouin, ont décidé de reporter l’évènement qui devait avoir lieu les jeudi 13, vendredi 14 et samedi 15 mai au Monastère des sœurs Sainte Françoise Romaine du Bec Hellouin. Compte tenu des mesures sanitaires relatives au corona virus prises pour avril et début mai 2021 par le gouvernement, nous ne pourrons pas utiliser la salle municipale qui devait accueillir les intervenants. Le monastère qui devait nous héberger ne le pourra pas non plus.
L’équipe organisatrice a réfléchi à deux solutions de rencontre.
Dans le même esprit de ce qui a été vécu en février et en mars 2021, un premier rendez-vous a eu lieu :
Nous conservons le même thème : « LA PAROLE » ; il sera repris et retravaillé, en vous proposant notamment des visio-débats de contact entre les lieux d’Eglise en Rural d’ici l’Ascension 2022.
Ce temps de Pâques nous appelle à revivre nos rencontres d’une autre manière en gardant au cœur cependant notre joie.
Fraternellement,
Le Carrefour Rural et Le Vivier
Ci-dessous, deux diaporama présentant l'importance de la Parole partagée pour Transhumances.
https://ahp.li/6d3bf8f67fd704646fdc.pdf
La Lettre du Lieux d'Eglise "L'Horizon"
dans les Vosges
Lire ici :
https://ahp.li/55ae76c796699e77964c.pdf
Sommaire :
1 – L’inter Lieux Ascension 2022
2 - Sommaire
3 - Cartes des Lieux en France
4 - Les Amis présents
5 - Présentation
6 - Accueil par les Présidents
7 à 11 - Les animations présentées le 14/05/21 (rencontre en visio)
La Parole dans l’Église
12 et 13 - Mr Arnaud Join Lambert
14 et 15 - Père Joël Morlet
La Parole dans la société
16 - Hélène Corbie (Journaliste) et Solidarité Paysans 27 (Thierry Mangeart et Odile Dorchies)
17 et 18 - Le Fraternibus
19 - Les ateliers du vendredi après-midi
20 et 21 - Récapitulatif des témoignages
22 - Lettre à mon Église
23 - Lettre à mon Église par Transhumances
La Parole dans la Bible
24 - Père Nicolas Le Bas
25 à 28 Célébration du samedi matin
29 - Conclusion
30 à 33 - Le Monastère Sainte Françoise Romaine
34 - Annexes
https://ahp.li/52d66121aeebd6640bb0.pdf
Dans la suite des réflexions sur le Synode 2023, des participants à l'interlieux ont voulu écrire une Lettre à notre Eglise.
Voici celle de Transhumances.
Cet interlieux a rassemblé une dizaine de lieux d'Eglise en Rural des 4 coins de France au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine au Bec Hellouin; il a permis d'échanger les points de vue, de partager la Parole, de dire et de se dire dans la joie.
Le jeudi de l'Ascension, Transhumances, l'Horizon, l'Oustal, Puits d'hiver, Partage et Pont de Pierre, Re-Source,Notre Eglise demain... entre nos mains, Le Carrefour Rural et Le Vivier se sont retrouvés au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine, pour se partager le vécu entre lieux d'Eglise.
Lire la suite ici :
A partir du jeudi de l'ascension, nous serons 4 membres de Transhumances à participer à l'Interlieux 2022.
Un temps fort où nous partagerons aux autres Lieux d'Eglise, le vécu de Transhumances.
Martine B, Mireille, Martine C et Jean-Marie
https://levivier.cathocambrai.com/interlieux-2021.html
https://chretiens-ruraux.fr/2021/06/23/interlieux-rencontre-2021-des-lieux-deglise-en-rural/
Petite chanson pastiche préparée pour l'interlieux 2022.
1 Et mêm’ sans église attitrée/
Exilés hors des bénitiers/
Cherchons l’air hors de la ville/
Un’ respiration d’évangile/
2 Et même si longtemps confinés/
Echanger, aider et prier/
Changer de terre ou de trace/
Trouver dans l’exil nos espaces/
Refrain :
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves/
Allons au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves/
3 Même si l’incertitude/
Inquiète nos lendemains/
Compagnons une certitude/
Sans défiance pour demain/
4 Se laisser altérer jamais/
Ecologie, solidarité/
Ouverture et fraternité/
C’est notre cri pour la paix/
Refrain
Intervention de Jean-François Petit à la Visio conférence du 14 mai 2021
Cette courte intervention voudrait tenter de ressaisir ce qui se joue dans la circulation de la parole, telle qu’elle est pratiquée dans les nouveaux lieux d’Eglise en rural (NLER). Les quatre séries de témoignages nous ont permis d’en avoir une appréhension large, sans la réduire à un seul registre : les NLER se situent bien aux carrefours d’attentes et de pratiques, que j’aimerais approfondir avec vous dans une perspective librement inspirée du jésuite Michel de Certeau pour voir l’aventure spirituelle qui s’y joue*.
Malgré leur fragilité, et peut être justement en raison de leur « porosité » avec les attentes et aspirations du monde rural, les NLER sont des lieux particulièrement propices à une circulation libre de la parole, au moment où les institutions ecclésiales sont affaiblies et décrédibilisées, tentées par un regain d’autoritarisme, à une période où le confinement en ajoute à la sécularisation ambiante**. Cette intervention comportera donc deux parties : des remarques sur la parole et des remarques sur le «croire » dans les lieux d’Eglise en rural.
I/ REMARQUES SUR LA PAROLE
Les différents témoignages entendus montrent la richesse de la diversité vécue dans les NLER mais on peut y regarder de de plus près.
Première remarque : qui parle ? des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des enfants, des « invisibles », des marginalisés, des « intégrés », des proches et des lointains, des homo et des hétéro, des célibataires et des gens mariés, des laïcs et des prêtres, des religieux/religieuses, des diacres, des croyants de toutes confessions, des incroyants, des « personnalités qualifiées » et des « sans grade »… La parole ne prend pas la forme d’un seul mode d’émission et ne descend pas d’en haut, de façon surplombante, pour « coiffer » ou « rectifier » des situations.
Les NLER, dans la diversité des locuteurs, font droit au besoin général d’expressivité, dans une écoute bienveillante, sans a priori, pour que les questions les recherches, les hésitations, les doutes, puissent librement être formulés, dans une attention aux voies émergentes (aux « petits prophètes » d’aujourd’hui). C’est aussi l’inattendu, l’inouï de la « foi » et de la « vie » de frères et de sœurs qui s’y joue.
Deuxième remarque : de quoi parle-t-on ? A priori de tout : il n’y a pas de sujets convenus, attendus, contrôlés. La libre circulation de la parole empêche ce qui est dit qu’être sélectionné à priori, éliminé, remodelé, hiérarchisé et interprété, en fonction de critères d’orthodoxie à la tradition religieuse, à la « bien-pensance ». On peut y parler de l’actualité mais aussi de tout ce qui fait la vie, de la convivialité mais aussi de sujets plus « sérieux », liés à la proximité ou à des enjeux globaux, aux questions émergentes comme aux réalités déjà présentes, Cela n’empêche les participants d’opérer un discernement de ce qui est dit ou écrit, mais la production du sens n’est pas monopolisée par une personne ou un groupe qui donnerait des « brevets de conformité ». C’est le droit à la libre recherche, à l’expérimentation, au tâtonnement, aussi bien sur les hypothèses de lecture de l’Evangile que sur les évolutions agricoles qui est ici légitimement revendiqué.
Or dans un monde en transformation globale, où les mutations sont nombreuses, nous n’avons jamais tant eu besoin d’explorer de nouvelles voies, tant sur les circuits économiques courts que sur les formes de scolarisation ou sur les recherches spirituelles contemporaines.
Troisième remarque : comment parle-t-on ? Si le modèle simple d’une communauté ayant une seule autorité n’existe plus en rural, structuré autour de la famille, du village ou de la foi, on parle nécessairement de façon polyphonique. Il n’y a plus une seule « référence » mais plusieurs cercles d’appartenance, comportant chacun plusieurs réseaux. Les espaces apparemment désertifiés sont aussi plus largement interconnectés. On parle donc dans un souci d’accueil inconditionnel, de proximité, de respect, d’absence de jugement de bienveillance mais aussi dans un constant débordement des pratiques, des croyances, de ce qui conduit à un constant débordement des stéréotypes ou des autorités, du type « l’Eglise a dit que », « ma famille pense que »… Les désaccords y sont régulés. Une parole risquée est toujours fragile pour celui qui l’énonce et celui qui la reçoit.
Globalement, on peut dire que les NLER « prennent soin » de la parole. On y croit qu’un climat de confiance fait émerger la parole personnelle vraie et qu’une parole collective (et parfois publique) peut y être élaborée.
Quatrième remarque : pourquoi parle-t-on ? Dans ces paroles reçues et échangées, se trouve la conviction que nous partageons tous la même humanité, que nous sommes « dans le même bateau ». Se trouve exprimée là une exigence d’humanité et de croyant : à travers la parole humaine se trouve peut-être la Parole d’un Autre qu’on peut apprendre à écouter ensemble. C’est cette confiance à la possibilité de découvrir les traces d’un visage différent qui anime les participants des activités des NLER. Les gens y expriment leur « foi », au sens large du terme, ils se risquent à un discours en « je », de façon libre et adulte, mais aussi en « nous » (ils deviennent partenaires, membres d’une même quête, dans une communauté de fait, dans une solidarité des ébranlés, dans un projet, dans une forme de partage et de prière). Cette parole se veut une parole « citoyenne », portée collectivement (par des groupes, des associations…). Elle répare (les situations plus injustes, les manques, les failles) et prépare (des temps, des horizons nouveaux).
Ayant abandonné toute protection d’une autorité leur délivrant des normes de comportement traditionnel, des habitudes, des routines et des sépulcres blanchis, ils se reposent les questions essentielles concernant les raisons de vivre, de croire, d’espérer. Leur sagesse est à recueillir et à approfondir
Cinquième remarque : à qui parle-t-on ? Sans doute, à tous ceux qui ont envie de bouger, de grandir, d’avancer dans la vie, en particulier aux plus fragiles, aux « périphéries existentielles » mais plus que des « cibles » de communication, il faudrait plutôt aujourd’hui approfondir les modalités de mise en réseau, de lien (entre ville et campagne par exemple)… pour ne pas parler dans le désert. Une véritable parole est toujours une parole adressée, à soi, aux autres et à Dieu.
II/ REMARQUES SUR LE CROIRE EN RURAL
On peut dire que si le rural aujourd’hui apparait à certains observateurs de plus en plus asservi à des fins matérielles, y compris une reconquête comme espace d’innovation et de participation et la recherche d’une cohérence et cohésion territoriale, il est aussi un lieu d’expérimentation d’un « croire ».
Or ce croire est essentiel à la vie en rural : il précède l’autorité et engendre l’institution. Le croire en une autorité est certes un critère de l’institution. Mais le croire dépasse souvent les limites des structures dans lesquelles nous voudrions le restreindre. Il excède même nos paroles. Il peut faciliter la cohésion comme engendrer un cloisonnement communautariste.
Bien accompagné, le croire mobilisé dans le langage – que celui-ci soit témoignage, oral ou écrit, présentiel ou distanciel, récit (à scruter comme dans les Ecritures ou à écrire comme dans un mouvement ou un lieu) – joue un rôle essentiel de médiation des énoncés dans les énonciations: il donne de l’autorité aux énonciations plus qu’aux énonciateurs et parfois aussi à la consistance à la doctrine qui est le garant des contenus du croire, en particulier au plan catholique.
Sans doute les autorités (notamment ecclésiales) sont fragmentées et deviennent multiples. Le christianisme est en voie d’exculturation depuis longtemps. Dans ce contexte, les énonciations deviennent plus complexes à opérer : l’affaiblissement des autorités dans leur forme traditionnelle sont en train de conduire à leur perte de crédibilité et à un manque de confiance en elles, laissant place à des autorités se présentant comme « charismatiques » (au sens sociologique du terme) ou des formes plus légalistes, perçues comme plus rassurantes.
Or le croire n’attend pas une institution (comme l’Eglise) pour se déployer même si celle-ci peut l’autoriser. Le croire peut chercher une institution pour le conforter (un diocèse ou une congrégation). En retour, l’institution peut lui donner forme, dans le cas présent, en soutenant les lieux d’Eglise.
Le croire se retrouve ainsi à la base d’une action, d’une pratique et d’une adhésion. Il permet d’agir au lieu de subir. Il permet de critiquer mais aussi de proposer, de dénoncer mais aussi d’annoncer. Il existe de ce fait une circularité entre le croire et l’action : le croire s’exprime en acte et en parole. Une communauté nait du besoin de croire, exacerbé par le vide de la société. Il se conjugue en une appartenance. Reste à espérer que ce croire puisse continuer à éviter la territorialisation forcée, l’assujettissement, y compris en des formes archaïques alors que le besoin de croire n’a jamais été aussi grand.
Un rassemblement des lieux d’Eglise en rural comme celui que nous venons de vivre peut-il permettre plus que le recueil de cette diversité du croire, essentiel pour l’avenir de l’espace rural ? Affaire à suivre…
Jean-François Petit, Institut Catholique de Paris
jfpetit@netcourrier.com
* Cf J.-F PETIT, Michel Foucault et Michel de Certeau, le dialogue inachevé, Parole et Silence, 2020
** Cf J.-F. PETIT, Ils furent pris d’une grande frayeur, Ed. St Leger, 2020
Il existe une quinzaine de "Lieux d'Eglise" comme Transhumances répartis en France. Tous les 2 ou 3 ans, ils se rassemblent, le temps d'un grand week-end, pour échanger et célébrer sur un thème.
Cette année ce rassemblement aura lieu du 13 au 15 mai (Ascension) en Normandie au Bec Hellouin sur le thème de :
La Parole.
"parole des hommes ? Parole de Dieu ? A qui donnons-nous la parole dans nos Lieux ? où ? Comment ? Qui écoutons-nous, ? Quand la partageons-nous ?"
Avec :
P. Joël Morlet : délégué national, mission en monde rural
P. Jean-François Petit : Religieux assomptionniste, docteur en philosophie, maître assistant à la faculté de l’Institut catholique de Paris
Hélène Corbie : Journaliste Reporter d'Images, créatrice de Podcast.
P. Yves Spriet : prêtre signataire de la lettre des 7 prêtres « pour rebâtir l’Eglise »
Si vous êtes partants, veuillez contacter, samedi 9 janvier au plus tard, Martine (0688203333) ou Pascale (0662672909) ou venir en parler ce samedi 09/01 à partir de 16h30 avant la lecture de « Fratelli Tutti » sur zoom.
Commentaires
08.10 | 11:43
Verhelst « quand je suis faible je suis fort « Debout dans l’épreuve
08.10 | 11:41
Lire le témoignage très frappant et émouvant de Thierry Verhelst attei...
01.10 | 05:38
Le pire ,comme l'a dit Anne Sinclair à propos d'elle-même et de DSK ,c'es...
22.08 | 05:09
Merci pour ces messages de l'été. Ils me rejoignent en Corrèze où je suis ve...
Le Carrefour Rural et Le Vivier, co-organisateurs de l’Interlieux Ascension 2021 au Bec Hellouin, ont décidé de reporter l’évènement qui devait avoir lieu les jeudi 13, vendredi 14 et samedi 15 mai au Monastère des sœurs Sainte Françoise Romaine du Bec Hellouin. Compte tenu des mesures sanitaires relatives au corona virus prises pour avril et début mai 2021 par le gouvernement, nous ne pourrons pas utiliser la salle municipale qui devait accueillir les intervenants. Le monastère qui devait nous héberger ne le pourra pas non plus.
L’équipe organisatrice a réfléchi à deux solutions de rencontre.
Dans le même esprit de ce qui a été vécu en février et en mars 2021, un premier rendez-vous a eu lieu :
Nous conservons le même thème : « LA PAROLE » ; il sera repris et retravaillé, en vous proposant notamment des visio-débats de contact entre les lieux d’Eglise en Rural d’ici l’Ascension 2022.
Ce temps de Pâques nous appelle à revivre nos rencontres d’une autre manière en gardant au cœur cependant notre joie.
Fraternellement,
Le Carrefour Rural et Le Vivier
Ci-dessous, deux diaporama présentant l'importance de la Parole partagée pour Transhumances.
https://ahp.li/6d3bf8f67fd704646fdc.pdf
La Lettre du Lieux d'Eglise "L'Horizon"
dans les Vosges
Lire ici :
https://ahp.li/55ae76c796699e77964c.pdf
Sommaire :
1 – L’inter Lieux Ascension 2022
2 - Sommaire
3 - Cartes des Lieux en France
4 - Les Amis présents
5 - Présentation
6 - Accueil par les Présidents
7 à 11 - Les animations présentées le 14/05/21 (rencontre en visio)
La Parole dans l’Église
12 et 13 - Mr Arnaud Join Lambert
14 et 15 - Père Joël Morlet
La Parole dans la société
16 - Hélène Corbie (Journaliste) et Solidarité Paysans 27 (Thierry Mangeart et Odile Dorchies)
17 et 18 - Le Fraternibus
19 - Les ateliers du vendredi après-midi
20 et 21 - Récapitulatif des témoignages
22 - Lettre à mon Église
23 - Lettre à mon Église par Transhumances
La Parole dans la Bible
24 - Père Nicolas Le Bas
25 à 28 Célébration du samedi matin
29 - Conclusion
30 à 33 - Le Monastère Sainte Françoise Romaine
34 - Annexes
https://ahp.li/52d66121aeebd6640bb0.pdf
Dans la suite des réflexions sur le Synode 2023, des participants à l'interlieux ont voulu écrire une Lettre à notre Eglise.
Voici celle de Transhumances.
Cet interlieux a rassemblé une dizaine de lieux d'Eglise en Rural des 4 coins de France au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine au Bec Hellouin; il a permis d'échanger les points de vue, de partager la Parole, de dire et de se dire dans la joie.
Le jeudi de l'Ascension, Transhumances, l'Horizon, l'Oustal, Puits d'hiver, Partage et Pont de Pierre, Re-Source,Notre Eglise demain... entre nos mains, Le Carrefour Rural et Le Vivier se sont retrouvés au monastère des soeurs Ste Françoise Romaine, pour se partager le vécu entre lieux d'Eglise.
Lire la suite ici :
A partir du jeudi de l'ascension, nous serons 4 membres de Transhumances à participer à l'Interlieux 2022.
Un temps fort où nous partagerons aux autres Lieux d'Eglise, le vécu de Transhumances.
Martine B, Mireille, Martine C et Jean-Marie
https://levivier.cathocambrai.com/interlieux-2021.html
https://chretiens-ruraux.fr/2021/06/23/interlieux-rencontre-2021-des-lieux-deglise-en-rural/
Petite chanson pastiche préparée pour l'interlieux 2022.
1 Et mêm’ sans église attitrée/
Exilés hors des bénitiers/
Cherchons l’air hors de la ville/
Un’ respiration d’évangile/
2 Et même si longtemps confinés/
Echanger, aider et prier/
Changer de terre ou de trace/
Trouver dans l’exil nos espaces/
Refrain :
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves/
Allons au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves
Allons au bout de nos rêves/
Tout au bout de nos rêves
Où la défiance s'achève
Tout au bout de nos rêves/
3 Même si l’incertitude/
Inquiète nos lendemains/
Compagnons une certitude/
Sans défiance pour demain/
4 Se laisser altérer jamais/
Ecologie, solidarité/
Ouverture et fraternité/
C’est notre cri pour la paix/
Refrain
Intervention de Jean-François Petit à la Visio conférence du 14 mai 2021
Cette courte intervention voudrait tenter de ressaisir ce qui se joue dans la circulation de la parole, telle qu’elle est pratiquée dans les nouveaux lieux d’Eglise en rural (NLER). Les quatre séries de témoignages nous ont permis d’en avoir une appréhension large, sans la réduire à un seul registre : les NLER se situent bien aux carrefours d’attentes et de pratiques, que j’aimerais approfondir avec vous dans une perspective librement inspirée du jésuite Michel de Certeau pour voir l’aventure spirituelle qui s’y joue*.
Malgré leur fragilité, et peut être justement en raison de leur « porosité » avec les attentes et aspirations du monde rural, les NLER sont des lieux particulièrement propices à une circulation libre de la parole, au moment où les institutions ecclésiales sont affaiblies et décrédibilisées, tentées par un regain d’autoritarisme, à une période où le confinement en ajoute à la sécularisation ambiante**. Cette intervention comportera donc deux parties : des remarques sur la parole et des remarques sur le «croire » dans les lieux d’Eglise en rural.
I/ REMARQUES SUR LA PAROLE
Les différents témoignages entendus montrent la richesse de la diversité vécue dans les NLER mais on peut y regarder de de plus près.
Première remarque : qui parle ? des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des enfants, des « invisibles », des marginalisés, des « intégrés », des proches et des lointains, des homo et des hétéro, des célibataires et des gens mariés, des laïcs et des prêtres, des religieux/religieuses, des diacres, des croyants de toutes confessions, des incroyants, des « personnalités qualifiées » et des « sans grade »… La parole ne prend pas la forme d’un seul mode d’émission et ne descend pas d’en haut, de façon surplombante, pour « coiffer » ou « rectifier » des situations.
Les NLER, dans la diversité des locuteurs, font droit au besoin général d’expressivité, dans une écoute bienveillante, sans a priori, pour que les questions les recherches, les hésitations, les doutes, puissent librement être formulés, dans une attention aux voies émergentes (aux « petits prophètes » d’aujourd’hui). C’est aussi l’inattendu, l’inouï de la « foi » et de la « vie » de frères et de sœurs qui s’y joue.
Deuxième remarque : de quoi parle-t-on ? A priori de tout : il n’y a pas de sujets convenus, attendus, contrôlés. La libre circulation de la parole empêche ce qui est dit qu’être sélectionné à priori, éliminé, remodelé, hiérarchisé et interprété, en fonction de critères d’orthodoxie à la tradition religieuse, à la « bien-pensance ». On peut y parler de l’actualité mais aussi de tout ce qui fait la vie, de la convivialité mais aussi de sujets plus « sérieux », liés à la proximité ou à des enjeux globaux, aux questions émergentes comme aux réalités déjà présentes, Cela n’empêche les participants d’opérer un discernement de ce qui est dit ou écrit, mais la production du sens n’est pas monopolisée par une personne ou un groupe qui donnerait des « brevets de conformité ». C’est le droit à la libre recherche, à l’expérimentation, au tâtonnement, aussi bien sur les hypothèses de lecture de l’Evangile que sur les évolutions agricoles qui est ici légitimement revendiqué.
Or dans un monde en transformation globale, où les mutations sont nombreuses, nous n’avons jamais tant eu besoin d’explorer de nouvelles voies, tant sur les circuits économiques courts que sur les formes de scolarisation ou sur les recherches spirituelles contemporaines.
Troisième remarque : comment parle-t-on ? Si le modèle simple d’une communauté ayant une seule autorité n’existe plus en rural, structuré autour de la famille, du village ou de la foi, on parle nécessairement de façon polyphonique. Il n’y a plus une seule « référence » mais plusieurs cercles d’appartenance, comportant chacun plusieurs réseaux. Les espaces apparemment désertifiés sont aussi plus largement interconnectés. On parle donc dans un souci d’accueil inconditionnel, de proximité, de respect, d’absence de jugement de bienveillance mais aussi dans un constant débordement des pratiques, des croyances, de ce qui conduit à un constant débordement des stéréotypes ou des autorités, du type « l’Eglise a dit que », « ma famille pense que »… Les désaccords y sont régulés. Une parole risquée est toujours fragile pour celui qui l’énonce et celui qui la reçoit.
Globalement, on peut dire que les NLER « prennent soin » de la parole. On y croit qu’un climat de confiance fait émerger la parole personnelle vraie et qu’une parole collective (et parfois publique) peut y être élaborée.
Quatrième remarque : pourquoi parle-t-on ? Dans ces paroles reçues et échangées, se trouve la conviction que nous partageons tous la même humanité, que nous sommes « dans le même bateau ». Se trouve exprimée là une exigence d’humanité et de croyant : à travers la parole humaine se trouve peut-être la Parole d’un Autre qu’on peut apprendre à écouter ensemble. C’est cette confiance à la possibilité de découvrir les traces d’un visage différent qui anime les participants des activités des NLER. Les gens y expriment leur « foi », au sens large du terme, ils se risquent à un discours en « je », de façon libre et adulte, mais aussi en « nous » (ils deviennent partenaires, membres d’une même quête, dans une communauté de fait, dans une solidarité des ébranlés, dans un projet, dans une forme de partage et de prière). Cette parole se veut une parole « citoyenne », portée collectivement (par des groupes, des associations…). Elle répare (les situations plus injustes, les manques, les failles) et prépare (des temps, des horizons nouveaux).
Ayant abandonné toute protection d’une autorité leur délivrant des normes de comportement traditionnel, des habitudes, des routines et des sépulcres blanchis, ils se reposent les questions essentielles concernant les raisons de vivre, de croire, d’espérer. Leur sagesse est à recueillir et à approfondir
Cinquième remarque : à qui parle-t-on ? Sans doute, à tous ceux qui ont envie de bouger, de grandir, d’avancer dans la vie, en particulier aux plus fragiles, aux « périphéries existentielles » mais plus que des « cibles » de communication, il faudrait plutôt aujourd’hui approfondir les modalités de mise en réseau, de lien (entre ville et campagne par exemple)… pour ne pas parler dans le désert. Une véritable parole est toujours une parole adressée, à soi, aux autres et à Dieu.
II/ REMARQUES SUR LE CROIRE EN RURAL
On peut dire que si le rural aujourd’hui apparait à certains observateurs de plus en plus asservi à des fins matérielles, y compris une reconquête comme espace d’innovation et de participation et la recherche d’une cohérence et cohésion territoriale, il est aussi un lieu d’expérimentation d’un « croire ».
Or ce croire est essentiel à la vie en rural : il précède l’autorité et engendre l’institution. Le croire en une autorité est certes un critère de l’institution. Mais le croire dépasse souvent les limites des structures dans lesquelles nous voudrions le restreindre. Il excède même nos paroles. Il peut faciliter la cohésion comme engendrer un cloisonnement communautariste.
Bien accompagné, le croire mobilisé dans le langage – que celui-ci soit témoignage, oral ou écrit, présentiel ou distanciel, récit (à scruter comme dans les Ecritures ou à écrire comme dans un mouvement ou un lieu) – joue un rôle essentiel de médiation des énoncés dans les énonciations: il donne de l’autorité aux énonciations plus qu’aux énonciateurs et parfois aussi à la consistance à la doctrine qui est le garant des contenus du croire, en particulier au plan catholique.
Sans doute les autorités (notamment ecclésiales) sont fragmentées et deviennent multiples. Le christianisme est en voie d’exculturation depuis longtemps. Dans ce contexte, les énonciations deviennent plus complexes à opérer : l’affaiblissement des autorités dans leur forme traditionnelle sont en train de conduire à leur perte de crédibilité et à un manque de confiance en elles, laissant place à des autorités se présentant comme « charismatiques » (au sens sociologique du terme) ou des formes plus légalistes, perçues comme plus rassurantes.
Or le croire n’attend pas une institution (comme l’Eglise) pour se déployer même si celle-ci peut l’autoriser. Le croire peut chercher une institution pour le conforter (un diocèse ou une congrégation). En retour, l’institution peut lui donner forme, dans le cas présent, en soutenant les lieux d’Eglise.
Le croire se retrouve ainsi à la base d’une action, d’une pratique et d’une adhésion. Il permet d’agir au lieu de subir. Il permet de critiquer mais aussi de proposer, de dénoncer mais aussi d’annoncer. Il existe de ce fait une circularité entre le croire et l’action : le croire s’exprime en acte et en parole. Une communauté nait du besoin de croire, exacerbé par le vide de la société. Il se conjugue en une appartenance. Reste à espérer que ce croire puisse continuer à éviter la territorialisation forcée, l’assujettissement, y compris en des formes archaïques alors que le besoin de croire n’a jamais été aussi grand.
Un rassemblement des lieux d’Eglise en rural comme celui que nous venons de vivre peut-il permettre plus que le recueil de cette diversité du croire, essentiel pour l’avenir de l’espace rural ? Affaire à suivre…
Jean-François Petit, Institut Catholique de Paris
jfpetit@netcourrier.com
* Cf J.-F PETIT, Michel Foucault et Michel de Certeau, le dialogue inachevé, Parole et Silence, 2020
** Cf J.-F. PETIT, Ils furent pris d’une grande frayeur, Ed. St Leger, 2020
Il existe une quinzaine de "Lieux d'Eglise" comme Transhumances répartis en France. Tous les 2 ou 3 ans, ils se rassemblent, le temps d'un grand week-end, pour échanger et célébrer sur un thème.
Cette année ce rassemblement aura lieu du 13 au 15 mai (Ascension) en Normandie au Bec Hellouin sur le thème de :
La Parole.
"parole des hommes ? Parole de Dieu ? A qui donnons-nous la parole dans nos Lieux ? où ? Comment ? Qui écoutons-nous, ? Quand la partageons-nous ?"
Avec :
P. Joël Morlet : délégué national, mission en monde rural
P. Jean-François Petit : Religieux assomptionniste, docteur en philosophie, maître assistant à la faculté de l’Institut catholique de Paris
Hélène Corbie : Journaliste Reporter d'Images, créatrice de Podcast.
P. Yves Spriet : prêtre signataire de la lettre des 7 prêtres « pour rebâtir l’Eglise »
Si vous êtes partants, veuillez contacter, samedi 9 janvier au plus tard, Martine (0688203333) ou Pascale (0662672909) ou venir en parler ce samedi 09/01 à partir de 16h30 avant la lecture de « Fratelli Tutti » sur zoom.
Commentaires
08.10 | 11:43
Verhelst « quand je suis faible je suis fort « Debout dans l’épreuve
08.10 | 11:41
Lire le témoignage très frappant et émouvant de Thierry Verhelst attei...
01.10 | 05:38
Le pire ,comme l'a dit Anne Sinclair à propos d'elle-même et de DSK ,c'es...
22.08 | 05:09
Merci pour ces messages de l'été. Ils me rejoignent en Corrèze où je suis ve...