"Frères humains, la voici l’heure la plus abandonnée !
Vous passez, vous passez comme les jours
qui meurent, comme la neige qui tombe. Vous passez les yeux à terre comme devant celui qui doit avoir honte. Mais comment pourrait s’exercer l’amour du prochain, la pitié du prochain, s’il n’y a plus de mendiants, ni de
pauvres, ni de fous, ni de ceux dont le cœur est à terre ? Vous dites — ce n’est pas mon prochain, celui-là. J’ai mon propre prochain à moi, moi ! À chacun son prochain — vous dites ! Et vous passez…
Alors tuez-les, tuez-les tous, les pauvres, les étrangers, les mendiants, les clodos, les désespérés, les fous, les cœurs hurleurs, les cœurs muets ! Comme ça l’amour ne sera pas nécessaire…
Et vous n’auriez plus honte pour votre prochain. Ça serait l’enfer, frères, ça serait l’enfer ! Et tout s’arrêterait. Alors… aimez votre frère qui tombe. Il faut beaucoup l’aimer.
Beaucoup-beaucoup…"
Dimitri Bortnikov Ecrivain