Jean 6,24-51
Le Pain de vie
Le chapitre 6 de Jean où se trouvent les extraits de ces dimanches,
forme un tout thématique sur la notion de Jésus comme Pain
de Vie,
une des notions clés de Jean.
Pour bien voir la portée de cet extrait, on peut lire tout le chapitre
et voir la progression de la pensée de l’évangéliste.
Dans une première partie, jusqu’au verset 40, la nourriture de
vie éternelle
se développe en référence à la manne que l’Ancien Testament
désigne comme le pain venu du ciel.
Pour les juifs, le don de la manne était le signe de leur espérance eschatologique,
l’attente de la venue du Messie.
D’où la demande de signe à Jésus :
« quel signe fais-tu donc pour que nous te croyions ? ».
Jésus
répond que la manne du désert, certes venait du ciel,
mais n’est pas le pain céleste authentique.
Celui-ci est donné seulement par « celui
qui descend du ciel ».
D’où la réplique des juifs : « donne-nous toujours de ce pain là »
qui n’est pas sans évoquer le « donne moi toujours de cette eau là » de la samaritaine.
Mais le Pain, comme la manne, dans les mentalités
rabbiniques du temps de Jésus,
c’était aussi bien la Torah que la Sagesse incarnée de Philon d’Alexandrie.
Jésus s’efforce
de conduire ceux qui l’écoutent plus loin,
comme pour la samaritaine ou Nicodème.
C’est alors que prend sens l’évangile de ce jour.
Jésus y dit trois choses.
La première, c’est que la volonté de Dieu à laquelle Jésus
obéit est de se « donner à voir ».
Par cette volonté, celui qui voit le Christ voit Dieu :
« certes, personne
n’a jamais vu le Père, sinon celui qui vient de Dieu ».
D’où la réaction des Juifs qui rapetissent Jésus à la génération, il est le fils
de Joseph.
La deuxième, c’est que voir Dieu en Jésus c’est vivre et posséder,
ici
et maintenant, la vie éternelle.
La troisième c’est que celui qui mange le pain vivant venu du ciel ne mourra pas.
Le contraste est désormais clair : la manne qu’a mangée le peuple au désert
n’est pas nourriture d’éternité car ceux
qui l’ont mangé sont morts.
Mais ceux qui mangent le Pain qu’est le Christ ne meurent jamais.
Se confond alors, en un même acte, vision et consommation
de Dieu en Christ et vie éternelle.
Dieu se donne à voir comme vie, puissance de vie, énergie de vie.
L’énergie « attire » au même temps qu’elle atteint, un physicien le comprend très bien.
J’ai toujours pensé
que le désir de vivre, le simple désir de vivre qui n’est pas si simple,
est un don du Seigneur,
celui qui commande
tous les autres.
Qu’en ai-je fait ?
Cela peut devenir prière et se muer en
demande, avec Ignace,
« d’une plus grande connaissance intérieure du Seigneur
qui pour nous s’est fait homme afin de mieux l’aimer et le suivre »
(Exercices spirituels n° 104)
ou Augustin :
« Ton désir est ta prière et si ton désir
est continu, continue est ta prière »
Angelo Gianfrancesco