Dimanche 15 juillet
Amos 7,12-15
Psaume 84 (85)
Lettre aux Éphésiens 1,3-14
Marc 6, 7-13
Il faut se le dire une fois pour de bon et aller jusqu’au bout de ce qu’on dit :
on n’est pas sauvé tout seul, mais avec les autres.
On n’est pas envoyé en solitaire,
mais « deux par deux » ;
on n’a pas la « foi » tout seul mais en église.
Tout
cela on le sait, depuis le baptême.
Cette théologie « chrétienne » du salut était bien fille de la culture grecque de son temps
autant que du judaïsme antique :
l’homme
grec ne se « pensait » pas en solitaire mais en ecclésia, en assemblé
(avec quand même quelques exclusions il est vrai, ce qui n’est plus le cas chez
les chrétiens en
principe…).
Quant au judaïsme, l’usage était connu, comme mesure de protection sur des routes malfamées
et dans le cadre juridique du témoin.
Cette théologie chrétienne du salut est aussi très naturaliste :
une molécule biologique ou une particule physique toutes seules,
ça ne donne ni un être vivant ni une étoile ;
un psychisme, ça n’existe qu’en relation avec d’autres « psychismes »
comme le maillage de ma grand-mère quand elle tricotait.
Catholique veut
dire universel.
On ne peut pas penser le chrétien autrement qu’en terme d’universalité de foi.
De foi seulement ?
Pour aller jusqu’au bout de la conception théologique,
il faut la
poser dans ses implications anthropologiques.
L’homme alors, l’homme historique, ce ne saurait être
je ne sais quelle « essence » ou « âme » abstraite inhérente à
l’individu
pris à part dans sa magnifique individualité,
si à la mode depuis des siècles d’idéalisme.
L’homme, dans sa réalité effective qui est son « essence » si l’on veut,
ce sont tous les hommes dans leur réalité historique et sociale
et pas autre chose.
Peut être serait-il temps, dans le prolongement de la perspective ouverte par l’Incarnation
et comme nous y invitent les sciences humaines et fondamentales,
de penser la notion de personne en fonction de l’idée de totalité
et non plus selon le binôme altérité-transcendance,
ou ce qui revient au même dans les relations sociales,
comme « des
errants,
chacun suivant son propre chemin »
(Isaïe 53,6).
L’évangile d’aujourd’hui, vécu dans le discernement quotidien,
ne peut pas ne pas faire la critique de son temps,
ou pour le moins façonner mon regard sur le monde qui m’est donné.
Alors, à la lumière de cette universalité de l’homme,
qu’elle soit le credo du chrétien ou d’autres,
comment apprécier cette éthique contemporaine qui idolâtre l’individu
plutôt que les hommes,
la réussite personnelle au détriment de celle des autres,
la plus value d’un groupe et de ses intérêts
à la défaveur d’un peuple et de sa survie,
d’une
nation contre d’autres nations,
le tout à partir de dogmes apparemment très humanistes.
Le royaume de Dieu ne consacre
pas l’élitisme.
Et le discernement ne sert pas à faire des procès.
Mais si l’on est bien persuadé
que l’humanisation la plus poussée
est la seule fin de l’histoire qu’il nous est donné de construire,
alors, le quant-à-soi et tout ce qui s’y rapporte doivent laisser la place à « ensemble »
et tout ce qui le favorise, en pratique.
Après tout, il n’y a peut-être pas de différence entre cette fin
de l’histoire
ainsi conçue et sa christification déjà réalisée sur la croix.
Angelo Gianfrancesco